La finance islamique au Kenya : Une nouvelle ère pour le développement économique

Le Kenya est en train de vivre une période de transformation de son paysage financier, avec deux événements importants qui devraient avoir un impact significatif sur l'économie : la cotation de la première obligation islamique du pays, Linzi Sukuk, et l'appel du président William Ruto à la mise en place d'un cadre réglementaire détaillé pour soutenir l'essor de la finance islamique. Survenus le 31 juillet 2024, ces développements arrivent à point nommé, alors que le Kenya cherche des opportunités d'investissement pour soutenir son économie. Le secteur de la finance islamique présente un excellent potentiel de développement économique au Kenya.

 

Le bien-fondé de Linzi Sukuk, le premier produit conforme à la charia à être coté à la NSE (Bourse des valeurs mobilières du Kenya)

La cotation du Linzi Sukuk sur la NSE - Nairobi Securities Exchange- (Bourse des valeurs mobilières du Kenya) marque une étape historique pour le Kenya. Cette obligation islamique de 3 milliards de shillings (23 millions de dollars) est le premier produit conforme à la charia à être admis sur la plate-forme des titres non cotés (USP) du NSE. Avec une période de maturité de 15 ans et un taux de rendement interne de 11,13 %, Linzi Sukuk vise à fournir des solutions de logement abordables tout en offrant des rendements d'investissement attrayants.

Le président Ruto a souligné l'importance de cette cotation, en insistant sur le fait qu'elle favorise l'inclusion financière et élargit l'accès au marché. Il a annoncé avec enthousiasme :

Aujourd'hui, nous lançons un produit de finance islamique monté par la Bourse de Nairobi pour faciliter la construction de logements sociaux. C'est l'essence même du partenariat public-privé. Nous utilisons des fonds privés pour fournir des logements publics. C'est le modèle qui permettra de mobiliser davantage de ressources que ce que le gouvernement peut faire. Ces fonds privés peuvent faciliter la construction de logements sociaux. En l'occurrence, nos forces de sécurité bénéficieront des logements qui seront construits grâce aux ressources que nous collectons par le biais de cette obligation Sukuk.

La structure du Sukuk facilite non seulement un accès à la propriété pour les Kenyans en permettant des paiements mensuels aussi bas que 7 700 shillings sur 15 ans, mais représente également un modèle évolutif pour l'investissement dans des logements abordables. Cette initiative s'inscrit dans le cadre de l'évolution mondiale vers une croissance économique stable et robuste, permettant de tirer parti des actifs financiers islamiques d'une valeur d'environ 5 000 milliards de dollars.

 

Un appel en faveur d'un cadre réglementaire

Lors de l'introduction en bourse de Linzi Sukuk, le président Ruto a demandé aux régulateurs financiers de collaborer avec le Trésor et les parties prenantes de la finance islamique pour développer un cadre réglementaire qui favorise la croissance de la finance islamique au Kenya :

J'ai demandé à nos régulateurs financiers de collaborer avec le Trésor national et les acteurs de la finance islamique pour développer un cadre réglementaire solide qui soutiendra la croissance de la finance islamique au Kenya.

Cette décision souligne l'engagement du gouvernement à intégrer la finance islamique dans la stratégie de développement économique du pays.

M. Ruto a souligné que la finance islamique avait le potentiel de débloquer des ressources d'investissement et de stimuler la croissance économique. Il a noté qu'un cadre réglementaire flexible est essentiel pour aider les petites et moyennes entreprises (PME) à lever des fonds sur les marchés de capitaux. La plateforme de titres non cotés de la NSE comprend désormais une plateforme de levée de fonds pour les PME, ce qui devrait faciliter ce processus.

 

Le potentiel de la finance islamique au Kenya

La finance islamique présente plusieurs avantages particulièrement intéressants pour la situation économique actuelle du Kenya. Tout d'abord, elle offre une source de financement alternative qui adhère à des principes éthiques et socialement responsables. Cet aspect est intéressant non seulement pour les acteurs économiques musulmans, mais aussi pour les non-musulmans qui privilégient les investissements éthiques.

Deuxièmement, les principes de la finance islamique, qui interdisent le paiement d'intérêts et mettent l'accent sur le partage des risques, peuvent conduire à des systèmes financiers plus stables et plus résilients.

En outre, l'inclusion de produits financiers conformes à la charia peut attirer un plus large éventail d'investisseurs, y compris ceux des pays à majorité musulmane. Cela peut renforcer l'investissement direct étranger et fournir des capitaux indispensables aux projets d'infrastructure et à d'autres initiatives de développement. Le président Ruto n'a, dès lors, pas manqué de souligner que la finance islamique a "un énorme potentiel pour débloquer nos ressources d'investissement et stimuler notre économie".

 

Défis à relever

Malgré son potentiel, la croissance de la finance islamique au Kenya est confrontée à plusieurs défis. L'un des principaux consiste à garantir l'intégrité et l'authenticité des produits conformes à la charia. Cela nécessite des cadres réglementaires solides et un contrôle constant pour garantir la conformité avec les principes islamiques. C'est pourquoi le président Ruto a appelé les parties prenantes à qui incombe la responsabilité de développer l'industrie de la finance islamique dans le pays à "mettre en place un cadre qui assurera la redevabilité et la stabilité, ainsi qu'un cadre qui soutiendra cette initiative".

En outre, il est nécessaire de sensibiliser et d'éduquer davantage les populations et les entreprises à la finance islamique. Le gouvernement, les institutions financières et les autres acteurs doivent conjuguer leurs efforts pour produire des informations et des ressources afin d'aider le public à comprendre les avantages et les mécanismes de la finance islamique.

 

Les avancées régionales en matière de finance islamique

Les avancées réalisées par le Kenya dans le domaine de la finance islamique s'inscrivent dans une tendance plus large dans la Corne de l'Afrique. La région a connu des développements significatifs, notamment l'ouverture de la première banque islamique (Salaam Bank) en Ouganda (mars 2024), la tenue de quatrième édition de l'Islamic Finance Tour Africa à Djibouti - IFT Djibouti (juin 2024), et la réunion annuelle du Conseil des services financiers islamiques (IFSB) à Djibouti (juillet 2024). Ces événements soulignent l'intérêt croissant dont jouit la finance islamique en Afrique de l'Est, soutenue par des réformes réglementaires et des initiatives gouvernementales.

L'industrie de la finance islamique a pris de l'ampleur en Afrique de l'Est, tout comme dans le reste du continent. Les pays voisins ont réalisé son potentiel à stimuler la croissance économique et l'inclusion financière. Par conséquent, la création d'un environnement favorable à l'essor de la finance islamique attirera à terme les investisseurs locaux et internationaux.

 

Il ne fait aucun doute que la cotation de la première obligation islamique du Kenya et l'engagement du gouvernement à mettre en place un cadre réglementaire favorable constituent des étapes importantes vers l'intégration de la finance islamique dans la stratégie de développement économique du pays. Ces développements, associés aux avancées régionales en Afrique de l'Est, soulignent l'importance croissante de la finance islamique dans la promotion de l'inclusion financière, l'attraction des investissements et la stimulation de la croissance économique. Alors que le Kenya fait face à des défis économiques, la finance islamique offre une voie prometteuse pour des solutions financières durables et éthiques.

 

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